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D’après les Bollandistes, le père GIRY, les propres des diocèses et tous les travaux hagiographiques. Vies des Saints de l’Ancien et du Nouveau Testament, des Martyrs, des Pères, des Auteurs Sacrés et ecclésiastiques, des Vénérables, et autres personnes mortes en odeur de sainteté.

Histoire des Reliques, des pèlerinages, des Dévotions populaires, des Monuments dus à la piété depuis le commencement du monde jusqu’aujourd’hui.

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Saint Guillaume

A Bourges, dans l’Aquitaine, saint Guillaume, archevêque et confesseur, illustre par ses miracles et ses vertus. Honorius III l’a inscrit au canon des Saints.

Sommaire

Hagiographie de saint Guillaume

Issu d’une antique et noble famille que devait encore illustrer une alliance avec la maison de France, il vit le jour au bourg d’Arthel, en Nivernais, dans la première partie du XIIe siècle, et fut confié par sa mère Maëncia à son oncle Guillaume, archidiacre de Soissons, appelé l’ermite pour ses vertus austères, lequel lui apprit de bonne heure à connaître les dangers de la vie, à mépriser les richesses et à préférer aux vains plaisirs du siècle les saines joies de l’étude et de la piété.

Moine à Grandmont

L’âge venu, il ne balança pas à se vouer au culte des autels, et fut, quoique bien jeune encore, nommé successivement chanoine des églises de Soissons et de Paris. Mais cette existence séculière ne lui paraissant pas assez sévère, il résigna ses bénéfices pour entrer au monastère du Grand-Mont, dans le diocèse de Limoges, qu’il ne tarda pas à quitter également, par suite des déplorables controverses soulevées entre les frères convers et les frères lais au sujet de l’exercice des affaires temporelles et spirituelles.

Saint Guillaume

Fête saint : 10 Janvier
Saint Guillaume de Bourges
Présentation
Titre : Archevêque de Bourges
Date : 1209
Pape : Eugène III ; Innocent III
Empereur : Otton IV

À l’époque où la pestilentielle hérésie des Albigeois sévissait le plus fort, changeait les églises en étables et menaçait d’éteindre le culte, le pape Innocent III avait essayé d’abord de la vaincre par la persuasion, en dépêchant aux schismatiques des religieux de l’ordre de Cîteaux, qui furent repoussés avec de graves injures. Forcé de recourir à d’autres voies, le pontife avait lancé dans toutes les provinces une lettre pressante engageant le peuple à se lever pour la destruction du fléau et le maintien de la foi...

Son élection

Importuné de tant de bruit dans un lieu où il avait cru trouver le calme et le silence, il vint prendre la robe des novices de Cîteaux, à l’abbaye de Pontigny.

Après avoir édifié cette maison, dont il devint le prieur claustral, ses vertus lui valurent de nouveaux honneurs et l’appelèrent plus tard à diriger, comme abbé, deux monastères de la filiation de Pontigny, celui de Fontaine-Jean, au diocèse de Sens, puis celui de Chalis, fondé, en 1136, près de Senlis, par le roi Louis le Gros, où il continua de goûter les douceurs de la retraite jusqu’en l’an 1199.

À cette époque, l’archevêque Henri de Sully, qui avait occupé le siège de Bourges après Guérin de Galardon, étant décédé, les chanoines s’assemblèrent pour lui choisir un successeur, et passèrent d’abord toute une première journée sans pouvoir s’entendre.

Il y avait trois modes de procéder en pareille matière : la postulation ou la voie du Saint-Esprit, le compromis et le scrutin. On commençait par la postulation, et l’on chargeait un chanoine d’indiquer un candidat. Si tous les votants se levaient, cet assentiment unanime, attribué à l’inspiration du Saint-Esprit, terminait l’épreuve. Dans le cas contraire, on passait au compromis, c’est-à-dire qu’on remettait la nomination soit à un membre du chapitre, soit à un personnage étranger au chapitre ; mais, dans ce cas, il était nécessaire que le mandataire fût désigné par tous les suffrages. Enfin, à défaut de résultat par ce second moyen, on avait recours au scrutin et l’on comptait les voix.

La postulation ayant été vainement tentée, on aborda le compromis, et l’on tomba d’accord pour confier l’élection à l’archevêque de Paris, Eudes de Sully, qui, ayant conservé son titre de chantre de l’église de Bourges, faisait partie du collège. Toutefois, on limita son choix aux noms de trois abbés de Cîteaux, et, la nuit étant venue, on remit la désignation au lendemain.

Eudes, n’osant lui-même trancher la question, eut recours à une sorte de tirage au sort connu sous le nom de sortes sanctorum, regardé par les uns comme un appel au jugement de Dieu, mais suspect à certains autres comme hasardeux et anticanonique. Le jour venu, il se rendit solitairement à l’église de Notre-Dame-de-Sales, déposa sous la nappe de l’autel trois billets dont chacun portait le nom d’un des trois abbés cisterciens, puis, après avoir célébré la messe, il retira l’un des billets, où se trouvait inscrit le nom de Guillaume, le digne abbé de Chalis.

Le chapitre s’était réuni dès le matin en l’église de Saint-Étienne, et, dans son impatience de connaître la décision d’Eudes, lui avait dépêché plusieurs messages, en le suppliant de porter son choix sur Guillaume. Les messagers arrivèrent au moment où l’archevêque de Paris venait de déplier le billet dont la désignation, conforme au désir général, parut une manifestation miraculeuse. Eudes se transporta en toute hâte à Saint-Étienne, et, du haut du maître-autel, raconta aux chanoines et au peuple ce qui venait de se passer, et quand il proclama que la volonté du ciel plaçait l’abbé de Chalis sur le siège de Bourges, l’assemblée entière, pénétrée de joie, éclata en bruyantes actions de grâces.

La nouvelle de son élection fut accueillie par Guillaume avec une surprise mêlée d’effroi ; il ne fallut rien moins que les ordres de l’abbé de Cîteaux et du légat du pape pour le déterminer à quitter sa chère retraite. Il prit tristement le chemin de Bourges, où il était attendu par tous les évêques de Guyenne, qui se disputèrent l’honneur de le sacrer.

Comment il exerce cette charge

En prenant possession de son diocèse, le premier soin de Guillaume fut de régler son extérieur aussi bien que son intérieur, sur les maximes de l’Évangile, car il était persuadé que tout homme, et principalement un évêque, doit commencer par établir en lui le règne du Christ. Il redoubla d’austérités, parce qu’il avait à expier, disait-il, ses propres péchés et ceux de son peuple. Hiver comme été, il garda son habit monastique, sous lequel il portait continuellement un cilice. Fidèle à la règle cistercienne, il s’interdit pour toujours l’usage de la viande, quoiqu’il en fît servir aux étrangers qui mangeaient à sa table, et qu’il croyait pouvoir sans péché traiter avec une honorable et large hospitalité.

Au début de son pontificat, Guillaume eut à subir de cruelles et dangereuses épreuves. Il s’attira la colère de Philippe-Auguste, en exécutant dans son diocèse la sentence d’interdit lancée par le pape Innocent III contre ce monarque, qui venait de répudier sa femme lngelburge pour s’unir par des liens adultères à Agnès de Méranie. Loin de plier devant la menace ou de se joindre à ceux qui conjuraient le Saint-Père de révoquer son arrêt, Guillaume, les larmes aux yeux, ordonna la suspension du culte. A sa voix les orgues se turent, les chants cessèrent dans les églises, on refusa la sépulture aux morts, et la ville, livrée à la terreur, offrit bientôt le plus lugubre spectacle.

Vainement les gens de cour, plus soucieux des faveurs d’ici-bas que de celles d’en haut, lui conseillèrent avec une apparente bienveillance d’apaiser au plus vite le roi par une prudente soumission ; vainement, passant des caresses à la violence, ils le menacèrent de la déchéance et de la confiscation de ses biens, la colonne de l’Église resta inébranlable.

Et cependant, celui qui sépara la créature du Créateur, l’antique ennemi des hommes, lui ménageait d’autres chagrins non moins cruels, en suscitant les plus regrettables conflits entre lui et les clercs de la cathédrale, à tel point que ceux-ci, oubliant toute retenue, affligèrent le saint prélat par de graves affronts.

Mais, avec le temps, Dieu ramena la concorde contre le père et les enfants ; il changea le cœur du roi, qui, repentant et soumis, rentra dans le giron de l’Église et rendit à Guillaume son estime et son amitié. De leur côté, honteux de leurs erreurs, les clercs vinrent s’humilier devant leur évêque, et, passant de la rébellion à la plus profonde obéissance, voulurent lui abandonner, ainsi qu’à ses successeurs, le droit de conférer les prébendes qui, selon les lois canoniques, appartenait alors à l’universalité des clercs. Plein de joie, le saint prélat s’empressa de les relever et de les serrer dans ses bras, en refusant toutefois des offres qui portaient atteinte aux prérogatives de l’Église.

Philippe Auguste (Recueil des rois de France de Jean du Tillet, vers 1550).
Philippe Auguste (Recueil des rois de France de Jean du Tillet, vers 1550).
Les fondateurs de Cîteaux Robert de Molesme, Aubry et Étienne Harding vénérant la Vierge Marie
Les fondateurs de Cîteaux Robert de Molesme, Aubry et Étienne Harding vénérant la Vierge Marie

Sa prudence et sa charité

Ce fut ainsi que, pendant les dix années qu’il eut l’honneur de diriger, à travers mille écueils, les destinées de l’Église du Berri, saint Guillaume ne cessa pas un instant d’offrir le parfait modèle des plus solides et des plus douces vertus, contre lesquelles se brisèrent la rage de ses ennemis et les traits acérés de l’envie. Son égalité d’âme, son inépuisable mansuétude lui conquéraient à la longue les gens les plus prévenus. « Comment peindre », s’écriait un de ses contemporains qui, après l’avoir longtemps méconnu, devint son plus ardent panégyriste, « comment peindre la grâce et la douceur de cet homme, duquel, en échange de mon hostilité et de mon mauvais vouloir, je ne reçus jamais que bienfaits et prévenances, sans pouvoir surprendre dans sa voix, dans son geste ou son regard, l’ombre d’un reproche ».

Néanmoins, cette excessive mansuétude, ce tendre amour du prochain, s’alliaient merveilleusement en lui au sentiment du devoir, qu’il n’oublia jamais. Il eut l’occasion d’en donner une nouvelle preuve, lorsqu’en 1204 il assista aux sévères réparations imposées par l’Église au fils de sa nièce, Pierre de Courtenay, le même qui fut plus tard empereur de Constantinople, et dont l’évêque d’Auxerre avait mis les domaines en interdit, à la suite de violentes discussions. Une mère désolée s’étant présentée devant lui avec le cadavre de son enfant que l’on avait refusé d’ensevelir à cause de l’interdit, le comte, irrité, le fit enterrer dans la chambre même du prélat. Un tel affront dépassait toute mesure ; l’heure de l’expiation arriva, et, de guerre lasse, il fallut se soumettre. Le dimanche des Rameaux, en présence d’une foule immense, Pierre se rendit nu-pieds, en chemise, à l’appartement de l’évêque, et dut exhumer de ses mains et porter au cimetière public le corps de l’enfant. Pendant cette longue et funèbre cérémonie, saint Guillaume se tint auprès de son neveu, ne cessant de l’exhorter à la patience et à la résignation, et buvant lui-même la plus grande part de cet amer calice.

Doux et affable pour tous, le vénérable pontife réservait aux misères humaines ses plus ardentes sympathies, ses plus suaves sourires. À leur vue seule ses yeux se mouillaient, sa main et son cœur s’ouvraient ; il lavait les pieds des pauvres, pansait leurs plaies, suivait leurs convois, visitait les cachots, en imposant obstinément silence à la gratitude de ses nombreux obligés, car il ne se croyait pas un saint et refusait de passer pour tel.

Ses miracles

Et cependant, comme tous les grands prédestinés, l’illustre archevêque avait reçu d’en haut le don de miracles, dont il ne fit jamais un vain étalage et dont il n’usa que pour la gloire de Dieu, au profit des malades et des affligés. Sans troubler les éléments, ses miracles salutaires assouplissaient les lois rigides de la nature. C’était un enfant mourant qu’il remettait plein de vie et de force à sa mère charmée, un paralytique dont sa bénédiction dénouait les membres, un énergumène auquel il rendait la paix du corps et de l’âme, un prisonnier dont il brisait les chaînes. Au seul contact de sa main, les aveugles, les sourds et les muets rentraient en possession de leurs sens.

Un jour qu’après la dédicace d’une église, il s’était retiré dans une prairie pour prendre un peu de repos et quelque nourriture avec ses clercs, une femme enceinte, nommée Humberge, se présenta devant lui tout en larmes et lui exprima ses craintes au sujet de sa prochaine délivrance, car quatre couches précédentes ne lui avaient donné que quatre enfants morts. Guillaume, touché de la douleur de cette femme, lui fit goûter ses mets et son breuvage, et bénit l’enfant qu’elle portait dans le sein. A peine rentrée chez elle, la pieuse Humberge mit au jour un fils ayant tous les dehors de la santé, et par la suite eut plusieurs autres enfants également robustes et vivaces.

Le Père Labbe rapporte une autre tradition, qu’il n’a, dit-il, rencontrée dans aucun écrit, mais que la mémoire du peuple et les belles sculptures du tombeau de saint Guillaume ont perpétuée.

Il y avait dans la ville de Bourges un misérable énergumène, sorte de fou furieux, qui courait de tous côtés, s’attaquant aux passants et les provoquant à la lutte. En vue de se venger de saint Guillaume dont il avait fort à se plaindre, le diable résolut d’enlever subrepticement cette brebis errante. Prenant donc une forme humaine, il se poste sur le chemin de l’énergumène, accepte son défi, le terrasse, le saisit à la gorge et se voit sur le point de lui faire rendre l’âme en état de péché mortel. Mais, averti de la scène qui se passe à la porte Gordaine, le saint pasteur se hâte d’accourir pour exorciser l’impur démon, qui lâche aussitôt sa proie en rugissant et se retire plein de confusion et les mains vides, comme un larron devant le juge.

Mais il faudrait des volumes pour mettre en relief chaque acte de cette glorieuse existence, si bien remplie, et qui l’eût été davantage encore si la mort jalouse ne l’eût inopinément tranchée.

Sa lutte contre les Albigeois

À l’époque où la pestilentielle hérésie des Albigeois sévissait le plus fort, changeait les églises en étables et menaçait d’éteindre le culte, le pape Innocent III avait essayé d’abord de la vaincre par la persuasion, en dépêchant aux schismatiques des religieux de l’ordre de Cîteaux, qui furent repoussés avec de graves injures. Forcé de recourir à d’autres voies, le pontife avait lancé dans toutes les provinces une lettre pressante engageant le peuple à se lever pour la destruction du fléau et le maintien de la foi.

Guillaume, répondant un des premiers à l’appel, avait pris la croix, et, malgré son âge, se disposait à marcher en personne à la tête des fidèles catholiques de son diocèse, quand, au commencement de janvier 1209, le dimanche avant l’Épiphanie, il eut froid en prêchant la guerre sainte dans un endroit de la cathédrale ouvert à tous les vents et revint avec une fièvre violente au palais épiscopal. Le lendemain, malgré cette indisposition qu’il croyait passagère, il voulut reprendre sa prédication, qu’un redoublement de fièvre le força d’interrompre.

L’extrême-Onction

Le 6 des Ides de janvier, il se mit au lit pour la dernière fois et les effrayants progrès du mal lui annonçant sa fin prochaine, il fit son testament et demanda l’Extrême-Onction. En effet, les instants pressaient et l’agonie commençait. Pourtant, quand on lui présenta le corps du Christ, Guillaume quitta son lit par un suprême effort et s’agenouilla sur le carreau, en disant qu’il ne pouvait recevoir autrement son divin maître.

Après la communion et quand on l’eut replacé sur sa couche, il supplia les chanoines de laisser enlever son corps par les frères de Chalis, et ne consentit à goûter un peu de repos qu’après leur avoir arraché cette promesse. Puis, il leur recommanda son église, son cher troupeau, les bénit une dernière fois et les congédia, car les ténèbres de la mort s’épaississaient autour de lui.

Resté avec quelques fidèles serviteurs, confidents de ses pensées, il se fait revêtir de ses habits pontificaux, demande qu’on lui apporte les ornements qui ont servi le jour de sa consécration, et avec lesquels il désire être enseveli. Il les examine, les retourne dans ses mains et passe à ses doigts ses bagues pastorales. Il lègue à l’église ses autres bijoux et ses autres vêtements, aux pauvres ses trésors, à chacun de ses serviteurs un souvenir précieux. Cette distribution achevée, il croise ses mains, tourne ses regards au ciel et s’absorbe dans la prière. Ses yeux brillent déjà d’une lumière céleste, sa bouche souriante murmure de vagues et suaves paroles ; il converse avec les anges, ses futurs compagnons.

Sa mort

L’heure de l’office du matin étant sonnée, il ordonne de dire les prières accoutumées, et lui-même, faisant le signe de la croix, essaie d’entonner le Domine, labia ; mais en ce moment, la voix lui manque, il ne peut continuer et un vénérable prêtre achève le verset. Alors, le patriarche fait signe qu’on l’enlève de son lit et qu’on le place à terre sur un cilice couvert de cendre. À peine y est-il déposé qu’il voit distinctement les anges battant des ailes au-dessus de sa tête. Il leur tend les bras, les appelle et son âme, exhalée dans un mélodieux soupir, s’envole avec eux vers les célestes régions, le vendredi, quatrième jour des Ides de janvier (10 janvier) de l’an de grâce 1209, sous le règne de Philippe-Auguste et le pontificat d’innocent III.

À la nouvelle de la mort du bienheureux Guillaume, la cité s’émeut et se lève tout entière. Hommes, femmes, vieillards, enfants, en habits de deuil et armés de cierges, suivent le corps jusqu’à l’église de Saint-Étienne où il est exposé, visage découvert, sur un brillant catafalque. Le jour et la nuit se passent dans les chants et les pleurs. Le samedi, au point du jour, le peuple des campagnes se joint à celui de la ville, laissant les maisons à l’abandon et les portes ouvertes, sans souci des intérêts terrestres. Des mères, portant leurs enfants à la mamelle, grossissent le convoi ; d’autres, craignant de manquer l’heure, oublient leurs nourrissons, qui restent exposés aux attaques des animaux domestiques ou des bêtes sauvages ; pieuse incurie dont elles n’auront pas à se repentir, car, au retour, elles retrouvent leurs ménages intacts et leurs enfants dormant tranquillement sous l’aile de l’ange gardien.

Miracles qui s'ensuivent

Et pour que la terre n’ignorât pas son triomphe, un globe de feu, pareil à la plus belle étoile, se détachant du firmament, planait au-dessus de l’église pendant les obsèques et de nouveaux prodiges prouvaient que la puissance du glorieux évêque lui survivait.

Un jeune garçon qui, depuis trois ans, ne pouvait se servir de ses pieds et de ses mains, avait néanmoins voulu être porté à l’église pour embrasser comme les autres le corps du Saint. Pendant qu’il accomplit ce pieux devoir, un grand craquement qui domine le bruit de la foule se fait entendre dans ses membres. La cérémonie terminée, la mère se met en route vers son logis, tenant toujours son fils dans ses bras, quand, à quelques pas de l’église, celui-ci lui dit :

« Mère, le bienheureux Guillaume était véritablement l’ami de Dieu et ses bienfaits dépassent toute parole. Pourquoi te fatiguer à me porter ? Ne pleure plus, chère mère, mets-moi à terre et regarde l’effet des vertus de notre père ».

En entendant ces paroles, la mère stupéfaite dépose sur le sol l’enfant, qui se met à courir vers l’église où il rentre en proclamant sa guérison et les louanges de l’illustre défunt.

À la vue de ce prodige, les moines de Chalis, qui étaient accourus en toute hâte avec un char pour emporter le corps de leur ancien abbé, mais qui commençaient à se laisser ébranler par les regrets des chanoines et les menaces du peuple, se retirèrent convaincus que la volonté du ciel était que cette précieuse dépouille restât la propriété de l’église de Bourges.

Et maintenant, laissons à la légende le soin de conserver la mémoire des innombrables miracles qui, pendant des siècles, s’accomplirent sur le tombeau et par les mérites de saint Guillaume. Au seul contact de cette pierre sacrée, à la simple invocation de ce nom vénéré, les maladies et les blessures mortelles sont guéries, les démoniaques délivrés, les insensés recouvrent la raison, les muets parient, les sourds entendent, les aveugles voient, les prisons s’ouvrent, les chaînes tombent, des enfants ravis par des loups sont retrouvés sains et saufs, jouant avec les petits et dans la tanière des bêtes fauves. Chaque jour enfante de nouvelles merveilles, et je me vois forcé de décliner une tâche à laquelle n’ont pas suffi la plume et le vélin des moines.

Enfin la renommée du nouveau saint prit un tel essor que Guy-Coquille, l’historien du Nivernais, rappelle « qu’en l’Université de Paris, la nation de France, qui est l’une et la principale des quatre nations faisans le corps de ladite Université, l’avait pris pour patron et protecteur ».

Ce fut sur ces preuves éclatantes qu’en 1218 le bienheureux Guillaume eut l’honneur d’être inscrit sur le catalogue des saints, de la main du pape Honorius III.

Culte et reliques

Au moment de la canonisation, en 1218, le corps de saint Guillaume déposé dans le premier caveau des catacombes de la cathédrale, fut renfermé par l’archevêque Gérard de Cros dans une magnifique châsse d’or et d’argent, et transféré derrière le maître-autel de la nef même. Cette imposante cérémonie, approuvée par une nouvelle bulle du Saint-Père, eut lieu le 7 mai 1218.

Girard ou Géraud, son successeur, fit en 1217 la translation de ses reliques, et Honorius III donna le décret de canonisation en 1218. La fête de saint Guillaume fut remise après l’Octave de l’Epiphanie, et fixée au 16 janvier, quoique le martyrologe romain en fasse mention le 10 du même mois.

En 1222, la comtesse de Nevers, petite-nièce du Saint, donna à l’église de Bourges des revenus sur ses terres du Nivernais pour qu’on allumât une lampe qui devait brûler à perpétuité devant le tombeau de son oncle.

Quelques années après, l’abbaye de Chalis obtint un os du bras de saint Guillaume, et le collège de Navarre, à Paris, une de ses côtes.

Le Père J. Branche, dans sa Vie des Saints et Saintes d’Auvergne et du Velay, dit (10 janvier) que l’église de Saint-Léger, en Auvergne, dans l’évêché du Puy, fut honorée de la plus grande partie des reliques de saint Guillaume. Elles furent, comme celles de Bourges, dispersées par les Calvinistes. Mais les habitants en ramassèrent quelques parties : le fémur, les deux faucilles des jambes, la plus grande partie du crâne, avec quelques autres pièces de la tête, quelques côtes et un grand nombre de petits os des doigts et autres parties du corps.

« Elles ont été mises depuis dans une châsse de bois, couverte au dedans d’un beau linge, au dehors de fer-blanc, et fermé d’une bonne clef, bien élevée derrière le grand autel, où j’ai eu l’honneur de les voir depuis peu et d’en conférer avec Messires les curés de Saint-Léger et de Saint-Paul, et avec Messire Guillaume Molinar, prêtre, qui m’ont juré sur leur foi que plusieurs malades allant faire leur dévotion devant ce saint Sépulcre y recouvrent la santé, et nommément ceux qui sont travaillés de la fièvre. Des petits enfants qui ne peuvent pas marcher au temps marqué par la nature, obtiennent leur guérison sur le lieu même, et d’autres après avoir fait vœu de s’y faire porter, ou d’aller visiter les saintes reliques. Tout contre cette église, il y a une fontaine dont l’eau guérit de la grappe, en s’y baignant ».

Nous nous sommes adressé à l’évêché du Puy pour savoir ce qu’il reste aujourd’hui de toutes les choses dont parle le P. Branche. M. Alirol a eu l’obligeance de nous donner les renseignements suivants : « Saint Léger était, avant la grande Révolution, une petite paroisse du diocèse du Puy. Au rétablissement du culte, l’église était ruinée, la population ne dépassait pas 150 âmes. Saint-Léger fut réuni à la paroisse de Sembadel. Ces deux localités sont dans le voisinage de La Chaise-Dieu, qui, avant la Révolution, appartenait au diocèse de Clermont.

« Les reliques que possédait l’église de Saint-Léger ont été dispersées, peut-être brûlées, en 1793. Je pensais qu’elles avaient peut-être été recueillies à Sembadel, et j’ai consulté les procès-verbaux de visite pastorale de cette dernière église. Je n’y trouve à ce sujet que ces trois mots :

Reliques sans authentiques.

Ce qui restait des reliques dans la cathédrale de Bourges fut brûlé en, 1562 et les cendres jetées au vent par les Huguenots ».

Iconographie

On représente saint Guillaume en archevêque, avec le pallium ; une étoile brille au-dessus de sa tête. On le trouve aussi agenouillé devant le Saint-Sacrement, ou tenant en main un ostensoir, symbole de sa dévotion.