D’après les Bollandistes, le père GIRY, les propres des diocèses et tous les travaux hagiographiques. Vies des Saints de l’Ancien et du Nouveau Testament, des Martyrs, des Pères, des Auteurs Sacrés et ecclésiastiques, des Vénérables, et autres personnes mortes en odeur de sainteté.
Histoire des Reliques, des pèlerinages, des Dévotions populaires, des Monuments dus à la piété depuis le commencement du monde jusqu’aujourd’hui.
Histoire des Saints, des Reliques, des pèlerinages, des Dévotions populaires, des Monuments dus à la piété depuis le commencement du monde jusqu’aujourd’hui.
On compte ordinairement quatre grands Prophètes, ainsi appelés pour les distinguer des douze autres, qui sont appelés petits Prophètes, parce que les livres qui leur sont attribués renferment bien moins de choses que ceux des quatre premiers. Or, Ézéchiel est un des grands, et le livre de ses prophéties est le troisième en ordre dans la Bible. Nous apprenons de ce qu’il dit lui-même, en ses écrits, qu’il était d’une famille sacerdotale et fils de Buzi. On croit qu’il naquit l’an du monde 3411. Saint Épiphane dit qu’il a pris naissance en la terre de Savera. Il est souvent appelé Fils de l’Homme, Filius hominis, parce que, disent saint Grégoire et saint Isidore, il a été en beaucoup de choses la figure de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui prend cette qualité dans l’Évangile. Ce mot, Ézéchiel, signifie force de Dieu, selon l’interprétation de la langue hébraïque ; en effet, il était nécessaire que ce grand serviteur de Dieu fût animé d’une force toute divine, pour aller sans crainte annoncer aux enfants d’Israël les grandes choses qui lui furent révélées, et leur exposer les menaces les plus terribles de la part du ciel, pour les faire rentrer en leur devoir. Aussi Dieu lui adresse ces paroles :
« La maison d’Israël a un front d’airain et un cœur endurci ; mais j’ai rendu votre visage plus ferme que leur visage, et votre front plus dur que leur front. Je vous ai donné un front de pierre et de diamant ; ne les craignez point, et n’ayez point peur devant eux ».
Origène, néanmoins, et saint Jérôme sont d’avis que ce mot Ézéchiel veut dire empire de Dieu, ce qui revient assez à la première interprétation.
Ce Prophète se trouva dans Jérusalem, lorsque Nabuchodonosor, roi de Babylone, vint assiéger cette grande ville, et que Jéchonias, ou autrement Joachim, roi de Juda, se rendit volontairement à ce prince étranger, suivant l’ordre de Dieu ; de sorte qu’il fut des premiers captifs du royaume de Juda, qui furent transférés de Jérusalem à Babylone, avec le roi Jéchonias. Il n’avait alors que vingt-quatre ans. Cinq ans après, Dieu lui communiqua le don de prophétie, dont il fit éclater les lumières durant les vingt-sept années de sa captivité. Il fut choisi de Dieu pour aller en ce pays d’exil, non en qualité de criminel, ni comme ayant participé aux dérèglements et aux fréquentes infidélités des Juifs ; mais il y alla, au contraire, parce qu’il était un grand ami de Dieu et qu’il lui avait toujours été très-fidèle, et que Dieu, voulant châtier son peuple et non l’abandonner entièrement, voulut que ce Prophète l’accompagnât pour le consoler, pour lui annoncer ses volontés, pour lui remontrer ses désordres et l’exhorter, dans le temps de sa captivité, à reconnaître la justice de Dieu qui, en les éloignant de leur pays, demandait qu’ils pleurassent leurs péchés pour attirer enfin les miséricordes sur eux ; ce fut donc là l’office d’Ézéchiel parmi le peuple Juif, à Babylone.
Saint Ézéchiel
Présentation
On compte ordinairement quatre grands Prophètes, ainsi appelés pour les distinguer des douze autres, qui sont appelés petits Prophètes, parce que les livres qui leur sont attribués renferment bien moins de choses que ceux des quatre premiers. Or, Ézéchiel est un des grands, et le livre de ses prophéties est le troisième en ordre dans la Bible.
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Il est aisé de voir par là que ce Prophète avait ordre de faire, en ces pays étrangers, ce que Jérémie faisait dans la ville de Jérusalem ; car Jérémie demeura toujours en cette ville pendant qu’elle fut assiégée par Nabuchodonosor, sous le règne de Sédécias ; et, depuis la destruction de cette ville, il resta encore parmi ceux d’entre les Juifs qui ne furent point menés captifs à Babylone, afin que ces peuples, toujours rebelles aux volontés de Dieu, eussent sans cesse devant les yeux un témoin fidèle de la vérité, qui leur reprochât l’impiété de leur conduite et leur représentât l’équité des jugements de Celui qui les punissait pour les faire retourner à leur devoir. Ce qu’il y a de bien admirable, et ce qui est une grande preuve de la divinité de Celui qui envoyait ces deux grands Prophètes, Jérémie et Ézéchiel, c’est que l’un étant en Chaldée, et l’autre en Judée, ils prédisaient néanmoins tous deux, dans le même temps, les mêmes choses, et représentaient également à Israël tous les malheurs qui menaçaient Jérusalem.
Ézéchiel nous fait connaître en son livre une chose qui lui est particulière ; c’est que, quoiqu’il fût captif à Babylone, il se trouvait néanmoins comme présent dans Jérusalem, l’esprit de Dieu lui faisant voir ce qui s’y passait, comme s’il y avait été en personne avec Jérémie ; de sorte qu’il annonçait au peuple les désordres de cette grande ville, dont Dieu seul pouvait lui donner connaissance ; et les Juifs de Babylone étaient merveilleusement fortifiés dans leur foi, quoiqu’en même temps confondus, quand, dans la suite, ils comparaient les prédictions de Jérémie avec celle d’Ézéchiel, et qu’ils remarquaient une si parfaite conformité entre les unes et les autres ; car saint Jérôme remarque que, dans ce temps, les prophéties de ces grands hommes étaient envoyés de part et d’autre : celle d’Ézéchiel à Jérusalem, et celles de Jérémie à Babylone.
Le saint Prophète dont nous parlons ici, était, si nous en croyons les plus savants, un homme d’une grande érudition et d’un esprit très-élevé. De là vient que plusieurs, au sentiment de Clément d’Alexandrie, l’ont pris pour Pythagore, et que saint Jérôme même l’appelle l’Océan des saintes Écritures et le labyrinthe des mystères de Dieu. En sorte que, sans parler du don de prophéties, qu’il possédait éminemment, et qui l’élevait au-dessus de ce qu’il y avait de plus grand, on l’a même comparé aux plus grands hommes de l’antiquité, pour ses belles pensées, ses nobles comparaisons et la profonde connaissance qu’il avait de toutes choses. Le caractère de son style, comme le remarque saint Jérôme, n’est ni trop sublime, ni trop abaissé, mais il tient le milieu. On remarque dans ses ouvrages une grande égalité ; car, quoique les autres Prophètes usent quelquefois de reproches animés pour reprendre les pécheurs, on peut dire d’Ézéchiel qu’il marche toujours d’un pas égal, et qu’il soutient plutôt la force de son discours par la grandeur des idées qu’il représente, telles que Dieu les lui fait voir, que par des expressions fortes et recherchées. Si ce lui est une chose commune avec plusieurs Prophètes, que de parler par énigmes et d’user d’expressions figurées, il a ceci de particulier qu’il ne s’exprime presque jamais d’une autre manière, et qu’il tient par là son lecteur toujours en suspens et en admiration pour le rendre plus attentif aux vérités qu’il lui annonce, et le presser davantage de demander humblement à Dieu l’intelligence de ses énigmes pleines de mystères.
Mais, quelque noble idée que l’on tâche de donner du mérite de cet incomparable personnage, on n’aura jamais une plus parfaite connaissance de ses véritables qualités et de la grandeur de son ministère qu’en lisant attentivement, dans le silence, Je livre même de ses prophéties, qui renferme autant de nouveaux mystères que de chapitres, et même que de versets. Il est vrai qu’il contient des choses très-difficiles, et même impénétrables à ceux qui les veulent comprendre par les seules lumières de la raison ; aussi saint Jérôme dit-il que c’était une tradition parmi les Hébreux, qu’il n’était permis de lire ces mystères qu’après avoir atteint l’âge nécessaire pour exercer les fonctions sacerdotales, c’est-à-dire à l’âge de trente ans ; mais néanmoins, Dieu n’a commandé à ce Prophète de manger le livre qu’il lui faisait écrire, qu’afin qu’en étant nourri et rassasié, il pût en nourrir aussi les autres, en leur annonçant et leur faisant comprendre tout ce qui lui était inspiré ; Dieu, d’ailleurs, se plaint de l’indifférence qu’avaient les Juifs à s’appliquer à entendre ce qu’on leur disait ; n’est-ce pas pour nous une exhortation à pénétrer autant que nous pourrons la profonde sagesse cachée sous les voiles des énigmes dont notre Prophète se sert en son livre ?
Ne faisant pas ici l’office d’interprète, nous n’entrerons pas dans une explication particulière des difficultés contenues en cet ouvrage. Nous nous contenterons d’avertir que tout le livre de la prophétie d’Ezéchiel se peut diviser en trois parties principales, par analogie avec la prophétie de Jérémie, qui a un grand rapport avec celle du Prophète dont nous parlons.
Dans la première partie, qui renferme les vingt-quatre premiers chapitres, Ezéchiel parle principalement des impiétés et des infidélités des Juifs, de la captivité à laquelle ils doivent être réduits étant menés à Babylone, de la destruction de la ville de Jérusalem et du temple ; et ce Prophète s’occupe à reprendre en une infinité de manières les Israélites, parce que l’esprit de Dieu lui fait connaître que s’il ne reprend pas son peuple, s’il ne l’avertit pas, il mourra à la vérité dans son iniquité, mais qu’il lui redemandera son sang ; et que si, au contraire, le Prophète annonce la vérité à l’impie, et qu’il ne se convertisse pas, l’impie mourra dans son iniquité, mais le Prophète aura délivré son âme. Voilà donc ce qui est contenu dans la première partie du livre dont nous parlons, et c’est aussi le même sujet dont il est traité dans les vingt-sept premiers chapitres de Jérémie qui composent la première partie du livre de ce Prophète.
La seconde partie du livre d’Ezéchiel contient neuf chapitres, savoir : depuis le vingt-cinquième jusqu’au trente-quatrième, dans lequel ce Prophète parle des malheurs qui doivent aussi arriver aux autres peuples, comme aux Ammonites, aux Moabites, aux Philistins, aux habitants de Tyr et de Sidon, aux Iduméens, aux Égyptiens, aux Chaldéens et à plusieurs autres peuples infidèles ; et c’est aussi là ce qui compose la seconde partie de la prophétie de Jérémie, dont il est parlé depuis le vingt-septième chapitre jusqu’au trentième.
Enfin, la troisième partie du livre d’Ézéchiel est renfermée dans les quatorze derniers chapitres, dans lesquels il prédit la liberté future des Israélites en leur pays, le règne de Jésus-Christ, souverain pasteur, le baptême des Chrétiens, la vocation des Gentils, la résurrection des morts et la destruction de Gog et de Magog ; d’où il prend sujet de consoler les Israélites, leur annonçant par avance que leur grande et sainte ville, qui a été brûlée, et le temple, qui a été détruit, seront enfin rétablis et remis en un très-bel état ; et c’est aussi ce même sujet dont parle Jérémie dans la dernière partie de sa prophétie, c’est-à-dire depuis le trentième chapitre jusqu’au trente-quatrième.
Dieu, voulant que toutes choses servissent de figure pour faire connaitre à son peuple ce qui lui devait arriver, afin qu’il se corrigeât et qu’il prévînt les malheurs qui le menaçaient, voulut aussi que le prophète Ézéchiel fût privé lui-même de ce qu’il avait de plus cher sur la terre. Sa femme mourut en ce temps, quatre ou cinq ans après qu’il eut commencé à prophétiser à Babylone, et il reçut ordre de Dieu de ne faire aucune plainte funèbre en cette occasion, de ne point pleurer, de ne laisser couler aucune larme sur son visage, et de ne rien faire, en un mot, de ce qui se faisait néanmoins communément pour les autres morts : ce qui était encore une figure de la maison d’Israël, qui devait être privée de ce qu’elle avait de plus cher, par l’exil et le carnage des femmes et des enfants, sans oser en faire paraître aucune douleur.
Pour ce qui est du temps auquel ce Prophète a commencé sa prophétie, il le marque lui-même avec une grande exactitude, nommant non seulement l’année, mais encore le mois et le jour, disant que ce fut en la trentième année, le cinquième jour du quatrième mois. Ce fut donc en la trentième année, à compter, selon saint Jérôme, depuis le temps où le livre de la loi, qui avait été perdu, ayant été retrouvé dans le temple le roi Josias et tout le peuple renouvelèrent l’ancienne alliance avec le Seigneur. Or, cette même année se rencontrait avec la cinquième de la captivité de Jéchonias, qui, comme on a remarqué plus haut, s’était rendu volontairement avec sa mère à Nabuchodonosor, suivant l’ordre que Dieu lui en avait donné, et qui fut transféré à Babylone avec Ezéchiel, Daniel et plusieurs autres. Il est encore facile de juger de l’espace du temps que ce Prophète a mis à publier les secrets de sa prophétie ; car l’on estime que ce fut pendant vingt-deux ans, d’autant qu’il a commencé, comme nous l’avons dit ci-dessus, la cinquième année de la transmigration de Jéchonias, ou Joachim, et qu’il a fini la vingt-cinquième du règne du même roi, comme il paraît par le texte du quarantième chapitre, ce qui donne déjà vingt ans ; et comme ce Prophète fait encore mention, dans le chapitre XXIX, V. 17, d’une autre vision qu’il eut en la vingt-septième année, c’est-à-dire deux ans après les vingt-cinq, on a lieu d’assurer qu’il a fait l’office de prophète pendant l’espace de deux ans au moins ; nous disons au moins, parce que nous ne marquons ici que ce qui se trouve dans le texte de l’Écriture
Comme les choses qu’Ézéchiel avait à annoncer aux Israélites, de la part du ciel, étaient d’une extrême importance, il n’omet rien de ce qui peut contribuer à faire valoir la vérité de la vision qu’il eut, si bien qu’aux circonstances du temps il ajoute exactement celles du lieu, quand il dit qu’il était alors au milieu des captifs, près du fleuve Chobar, qui verse ses eaux dans l’Euphrate, non loin de Circésium. Ce saint homme considérait sans doute, dans le cours rapide des eaux de ce fleuve, la rapidité de l’écoulement perpétuel de toutes les choses de ce monde qui passent et qui disparaissent en un moment. Le roi David, comme le remarque encore saint Jérôme, avait déjà prédit, par un mouvement de l’esprit de Dieu, que le peuple Hébreu devait s’asseoir sur les bords des fleuves de ce royaume, lorsque, dans ses Psaumes sacrés, il leur avait mis ces paroles dans la bouche :
« Nous nous sommes assis, et nous avons pleuré le long des fleuves de Babylone. – Super flumina Babylonis illic sedimus et flevimus ».
Il est bon de remarquer ici, pour notre instruction, que ce ne fut pas au commencement de la captivité d’Ézéchiel que Dieu se ft voir à lui, mais dans la cinquième année dont nous avons parlé, c’est-à-dire après qu’il eut beaucoup souffert, et que les autres captifs, abattus aussi par leurs souffrances, semblèrent être plus en état d’écouter ce que le Seigneur devait leur dire par la bouche de ce saint Prophète. Lors donc qu’il était au milieu des captifs, les cieux lui furent ouverts : cela nous apprend que c’est dans les tribulations et dans l’adversité que Dieu fait les plus grandes faveurs : quand nous nous trouvons dans la plus dure captivité et dans la dépendance de toutes choses, c’est alors, si nous savons en faire un bon usage, que nous devons attendre du ciel nos plus grandes lumières et les secrets de nous procurer la plus parfaite liberté.
Nous ne devons pas oublier de dire un mot de l’âge que pouvait avoir le Prophète dont nous parlons, quand il commença à prophétiser. Saint Jérôme, saint Grégoire et les Hébreux croient que ce fut à l’âge de trente ans, pour imiter, dit Origène, la conduite de Jésus-Christ même, dont il était la figure, et qui, aussi bien que saint Jean-Baptiste, son précurseur, n’a commencé à prêcher qu’à cet âge ; mais on ne peut rien assurer de bien certain là-dessus, d’autant plus que si nous en croyons l’historien Josèphe, Ézéchiel était fort jeune quand il fut emmené captif à Babylone, et qu’il est sûr, comme nous l’avons fait remarquer, que ce fut cinq ans seulement après avoir demeuré dans ce pays étranger, qu’il commença à faire l’office de prophète.
Après avoir expliqué toutes ces circonstances, qui peuvent aider à comprendre le livre de la prophétie d’Ézéchiel, nous pourrions maintenant rapporter ici les beaux éloges que les Pères de l’Église lui donnent, faisant réflexion sur le caractère de son esprit et sur la profondeur des mystères renfermés dans son livre. Outre la qualité de Prophète, qui lui est justement attribuée pour avoir prédit aux Juifs une infinité de choses longtemps avant qu’elles fussent arrivées, saint Grégoire, au livre XXVI de ses Morales, chap. 5, assure qu’il fait la gloire et l’honneur de tous les Maîtres et de tous les Docteurs ; et, écrivant sur les prédictions qu’il a faites, il dit qu’il est le parfait modèle de tous les prédicateurs. Il est vrai qu’il se rend terrible, redoutable et même dur, pour me servir du terme de ce Père ; mais c’est, ajoute-t-il, qu’il avait ordre d’annoncer des choses extrêmement dures à ceux qui étaient endurcis dans le mal. Ce même Père fait néanmoins remarquer fort judicieusement, qu’Ézéchiel, comme dit l’Écriture, pleura amèrement pendant l’espace de sept jours, étant au milieu de tout le peuple, avant d’entreprendre de lui parler d’aucune chose et de le rependre de quoi que ce fût, observant exactement pendant tout ce temps de silence, ce qu’ils faisaient ; il a donné un bel exemple à tous les pasteurs et à tous les prédicateurs, qui ne parleront jamais utilement, ni justement, qu’après qu’ils auront longtemps gardé le silence, qu’ils auront versé une grande abondance de larmes sur les maux qu’ils voient, et observé avec une grande exactitude tout ce qui se passe :
« Parce que », dit saint Grégoire, « celui-là seul sait parler comme il faut, qui a su se taire autant qu’il doit. Que ceux donc », continue ce saint Docteur, « qui veulent être excellents prédicateurs, imitent ceux qui ne prêchent que des choses puissantes et capables de pénétrer les cœurs et de les porter à la pénitence, et qui n’omettent rien avec cela pour prendre une parfaite connaissance des fautes avant d’en accuser et d’en reprendre personne ».
– Illos imitari delectus praedicator debet, qui et acuta praedicant, et quae loquuntur observant.
La mission du saint personnage dont nous parlons était si relevée, ses visions si sublimes, sa manière de vivre et de faire connaitre ses prédictions si extraordinaires, qu’il est appelé, par le Saint-Esprit même, le prodige de son temps et, un signe tout à fait extraordinaire donné à la maison d’Israël, pour lui prédire tout ce qui lui arriverait » ; et tous ceux qui liront avec attention cette prophétie, conviendront aisément de cette vérité ; de là vient que saint Grégoire de Nazianze l’appelle le Prophète des choses sublimes, l’interprète des grands mystères, le prophète très-subtil et digne de toute admiration.
Il ne sera pas néanmoins inutile de faire ici réflexion, avec saint Jérôme, sur l’humilité profonde de ce grand homme, au milieu de ses visions les plus sublimes, et des qualités les plus éminentes qui lui sont attribuées ; car il avoue lui-même qu’ayant eu ces grandes révélations, il se jeta le visage contre terre, dans la vue de son néant, et pour adorer Dieu comme avait fait Abraham, lorsque le Seigneur lui ayant parlé, il se prosterna aussitôt pour s’anéantir en sa présence ; bel exemple pour tous ceux qui reçoivent les plus grandes faveurs du ciel, et qui sont favorisés des plus secrètes communications divines.
D’après un grand nombre d’interprètes, Ézéchiel a mérité d’être honoré de la qualité de martyr. Nous n’avons rien de bien évident sur le genre de sa mort ; mais l’ouvrage attribué à saint Épiphane, sur la vie et la mort des Prophètes ; saint Isidore, évêque de Séville ; l’auteur de l’Ouvrage imparfait sur saint Matthieu, et surtout le Martyrologe romain en ce jour, disent qu’il fut tué à Babylone, par le juge du peuple d’Israël, parce qu’il le reprenait de son idolâtrie ; et le Martyrologe ajoute qu’il fut ensuite enterré dans la sépulture de Sem et d’Arphaxad, qui étaient les ancêtres d’Abraham. Saint Athanase, en son livre de l’Incarnation du Verbe, dit que « ce Prophète est mort pour la cause du peuple, parce qu’il annonçait au peuple les choses fâcheuses qui lui devaient arriver ». L’auteur de l’Ouvrage imparfait que nous venons de citer, dit que ce digne Prophète, étant condamné à mourir, fut conduit en un endroit où il y avait une grande quantité de pierres, et que là il fut lapidé. Andrichomius, dans son livre qu’il appelle le Théâtre de la Terre Sainte, croit qu’il fut condamné à être écartelé ; mais on ne voit point d’auteur ancien qui fasse mention de ce genre de mort.
On voit encore aujourd’hui en un lieu nommé Kiffel le tombeau du Prophète. Le chef des tribus qui habitent ce pays conduit les voyageurs dans une grande salle, soutenue à l’entour par des colonnes. Au fond de cette salle, une grande boîte contient une copie des cinq livres de Moïse, écrite sur un seul rouleau. Du côté du sud, une petite pièce renferme le tombeau d’Ézéchiel. Le dôme de cette chambre est doré et continuellement illuminé par une grande quantité de lampes qui ne s’éteignent jamais.
Saint Isidore et saint Épiphane rapportent plusieurs miracles qu’on dit avoir été faits par ce Prophète, comme d’avoir fait passer les Juifs à pied sec par le milieu du fleuve de Chobar, à peu près comme Moïse fit autrefois passer la mer Rouge aux Israélites ; d’avoir obtenu de Dieu une très-abondante quantité de poissons, pour nourrir un grand nombre de Juifs, qui étaient extrêmement pressés par la faim, et d’avoir fait naître subitement une infinité de serpents venimeux pour punir une partie du peuple qui avait commis de grandes fautes ; mais il n’est point parlé de ces merveilles dans le livre de notre Prophète, ni en aucun autre de la sainte Écriture : nous en laissons donc le jugement aux discrets lecteurs.
La plus belle page d’Ézéchiel est sa vision du jugement dernier : la grandeur terrible de cette vision qui nous transporte à l’heure où les terres et les océans rendront leurs morts, n’a d’égale dans aucune littérature.
« La main de Jéhovah », dit le Prophète, « se reposa sur moi et me transporta, dans une vision divine, au milieu d’une plaine couverte d’ossements. Après que l’Esprit m’eut fait parcourir ce champ lugubre, dans lequel je contemplais des ossements sans nombre, blanchis par le temps : Fils de l’homme, me demanda Jéhovah, ces restes desséchés revivront-ils ?
– Seigneur, répondis-je, vous le savez.
– Et la voix reprit :
« Adresse-leur la parole ; dis-leur : Ossements arides, écoutez l’ordre de Jéhovah.
Voici ce qu’a dit l’Éternel :
« Mon souffle va vous pénétrer et vous vivrez ; j’étendrai sur vous des nerfs comme un réseau, je ferai croître des chairs que je recouvrirai d’une peau nouvelle ; j’inspirerai en vous l’esprit de vie, et vous ressusciterez.
« Je pris la parole et je reproduisis l’ordre divin. À ma voix, un cliquetis sonore retentit parmi les ossements agités en tous sens. Les os se rapprochaient des os, selon la juxtaposition de leurs attaches. Sous mes yeux, ils se recouvrirent de leur réseau nerveux, de chairs et d’une peau nouvelle. Mais ils n’avaient point encore l’esprit de vie ; et Jéhovah me dit : Fils de l’homme, adresse-toi à l’Esprit, dis-lui : Voici la parole d’Adonaï le Seigneur : Esprit, accours des quatre vents du ciel, souffle sur ces morts, et qu’ils revivent.
« Ma voix répéta l’ordre divin. Aussitôt, l’esprit de vie pénétra ces cadavres gisants ; ils ressuscitèrent, et se dressant sur leurs pieds devant moi ils m’apparurent comme une armée innombrable. Jéhovah me dit alors : Fils de l’homme, ces ossements desséchés sont la figure de la maison d’Israël. Ils ont dit dans leur exil : Nos os ont blanchi sur la terre étrangère, notre espoir s’est évanoui, et nous sommes morts à jamais. Va leur faire entendre ta prophétie : dis-leur : Voici la parole d’Adonaï Jéhovah : O mon peuple, je briserai la pierre de ton sépulcre, je te ferai sortir du tombeau, pour te ramener au pays d’Israël. Vous saurez, en ce jour de votre résurrection, quand vous secouerez la poussière de la tombe, pour retrouver la liberté et la vie, que je suis Jéhovah votre Dieu. Mon souffle passera sur vous, je vous rendrai au repos sur le sol natal, et vous direz : Adonaï, le Seigneur, l’avait promis, et il a accompli ces merveilles ».
Raphaël a peint la vision du char mystérieux trainé par quatre animaux qui figurent les quatre évangélistes ; Ézéchiel se trouve sur les fameuses portes de l’église Saint-Paul hors les Murs, à Rome, avec un cartouche portant ces mots en latin : Le Seigneur me conduisit par le chemin de la porte septentrionale. Cette porte désigne l’entrée des nations infidèles dans l’Église ; on le représente aussi vêtu en grand prêtre juif, il tient une petite forteresse ou tour fortifiée dont la porte est fermée, symbole de la virginité de Marie annoncée par Ézéchiel en ces termes :
« J’ai vu une porte fermée dans la maison du Seigneur », ch. XLIV, V. 1 ;
On le trouve enfin, debout, au milieu de la vallée de Josaphat, entouré de morts qui soulèvent le couvercle de leur tombeau et se raniment au souffle de Dieu.
Les Grecs et les Russes ont choisi le 21 juillet pour honorer la mémoire d’Ézéchiel.
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